

Superbranche lève 13M€ pour poursuivre son développement
28 avril 2025
Superbranche, start-up pionnière dans le développement et la fabrication de nanoparticules superparamagnétiques, basée à Strasbourg et accompagnée par Quest for health, a annoncé récemment une levée de fonds de 13M€.
Delphine Felder-Flesch, sa CEO, revient sur les coulisses de cette levée et les défis rencontrés.
Pouvez-vous nous raconter la genèse de Superbranche ?
Superbranche est une spin-off du CNRS, plus précisément de l’IPCMS (Institut de Physique et Chimie des Matériaux de Strasbourg). J’étais directrice de recherche au CNRS et, à l’origine, mon travail portait sur l’auto-organisation de la matière, notamment les cristaux liquides et les dendrimères. L’idée d’appliquer ces recherches à la santé est venue d’une rencontre lors d’une conférence : un biologiste nous a suggéré d’explorer le potentiel de nos nanoparticules dendronisées comme agents de contraste en IRM.
Ce projet a rapidement pris de l’ampleur, suscité l’intérêt des cliniciens des Hospices Civils de Lyon, et abouti à plusieurs dépôts de brevets. En 2019, j’ai fait le choix de me mettre en disposition à 100 % pour me consacrer pleinement au développement de Superbranche.
Superbranche vient de lever 13M€. Pouvez-vous nous parler du chemin parcouru et des principaux défis rencontrés ?
L’amorçage a été une étape cruciale et difficile dans le parcours de financement de notre start-up. Pour convaincre les premiers investisseurs, nous avons dû rapidement faire des arbitrages de marché, réaliser des preuves techniques, consolider notre propriété intellectuelle et convaincre des talents de nous rejoindre. Notre technologie deeptech et versatile, qui nécessite une intensité capitalistique forte et peut potentiellement adresser de nombreux marchés, a demandé un important travail de structuration.
Une partie de ce travail a été accélérée par le concours i-Lab, dont nous avons remporté le Grand Prix. Cette reconnaissance, apportée par le Ministère de l’Enseignement Supérieur et Bpifrance, a renforcé notre crédibilité et notre visibilité et nous a permis de convaincre les Alsace Business Angels (ABA) et les investisseurs du WiClub Santé, un outil de financement participatif en club deal unique en Europe, mis en place par WiSEED et Quest for health. Ces fonds nous ont permis de maximiser les effets de levier non dilutifs de Bpifrance et de la Région Grand Est, des aides cruciales à ce stade de développement.
Grâce à ces premiers investisseurs, nous avons levé 1,6 million d’euros, ce qui nous a donné les moyens de monter en échelle de production grade R&D de nos nanoparticules dendronisées et de réaliser les premiers tests sur le cancer du pancréas en collaboration avec un grand groupe. Cette validation a renforcé la crédibilité de notre technologie et a démontré notre capacité à délivrer les livrables dans les délais impartis pour un grand compte, des facteurs décisifs pour la suite.
Ce fut ensuite le parcours intense de la série A. Superbranche est une start-up industrielle et biotech dont l’innovation réside dans le procédé de production des nanoparticules. Dès le départ, nous savions qu’il nous faudrait déployer une usine de production. Or, il est rare pour une start-up santé d’intégrer d’emblée une stratégie industrielle, une composante peu considérée par la grande majorité des fonds d’investissement santé.
Le déclencheur de cette levée de fonds a été Bpifrance, via son fonds SPI (Sociétés de Projets Industriels), qui s’est rapidement intéressé à notre volet industriel. Cependant, SPI n’avait jamais investi dans un projet en santé. Leur due diligence, très constructive, a duré un an jusqu’à fin 2023 et nous a permis de faire évoluer notre plan de développement. Elle a aussi contribué à convaincre un family office de fournir la contrepartie nécessaire.
En parallèle, nous avons mené une campagne intense : 250 fonds contactés, 80 rendez-vous, 15 NDA signés et une dataroom partagée avec cinq ou six investisseurs. En janvier 2024, SPI a demandé l’implication d’un investisseur leader et expert en santé. Capital Grand Est s’est positionné et son audit a duré neuf mois. Notre principal enjeu a été d’ajuster notre approche pour prouver notre autonomie sur le produit et convaincre les investisseurs du potentiel de nos applications en oncologie.
Quels ont été les moments les plus durs de cette levée ?
Le plus grand challenge fut le temps et la maitrise de la trésorerie. Nous avions techniquement bouclé 10M€ fin 2023, mais nous avions dû nous réorganiser pour trouver un fonds expert en janvier 2024. Nous avons dû réaliser un bridge de financement dans des conditions tendues.
Les discussions ont commencé en juillet 2022. J’avais prévu 18 mois de levée, et nous avons finalement bouclé le tour le 16 décembre 2024. Les investisseurs ont été impressionnés par notre résilience et notre capacité à délivrer dans les temps impartis les réponse à leurs attentes mais honnêtement, si j’avais su l’ampleur de ce marathon, j’y aurais peut-être réfléchi à deux fois.
Quels conseils donneriez-vous à une start-up qui veut lever des fonds ?
1. Anticiper : Une levée prend toujours plus de temps qu’on ne le pense. Il faut s’y prendre tôt et prévoir des solutions de financement transitoires (bridge, subventions…).
2. Rester fidèle à sa vision : Les investisseurs peuvent avoir des exigences divergentes. Il faut savoir les écouter sans perdre l’ADN du projet.
3. Garder la R&D en priorité : Pour me consacrer pleinement à la levée, j’ai délégué une partie significative de mon temps de R&D à mon Directeur technique et l’équipe pour maintenir une dynamique forte car c’est le cœur de notre valeur ajoutée et ce qui nous distingue.
4. S’entourer : Avoir des partenaires techniques et financiers solides, un Board à l’écoute et force de propositions, des experts qui vous challengent, et une équipe alignée est indispensable.
5. Persévérer : Il y aura des moments de doute. Garder le cap et la passion est ce qui fait la différence.
Quelle est la prochaine étape pour Superbranche ?
Notre priorité est de finaliser l’implantation de notre usine et d’accélérer nos essais précliniques. Cette levée nous en donne les moyens, mais l’aventure ne fait que commencer !