Un test rapide pour prescrire l’antibiotique le plus efficace
Un test rapide pour prescrire l’antibiotique le plus efficace

Un test rapide pour prescrire l’antibiotique le plus efficace

19 août 2024

700 000 personnes meurent chaque année de la résistance aux antibiotiques. En l’absence de mesures mondiales renforcées, ce chiffre pourrait atteindre 10 millions d’ici à 2050.
L’utilisation excessive d’antimicrobiens est la principale cause de l’émergence de bactéries résistantes aux médicaments. Ces résistances peuvent entraîner des infections plus graves, des séjours hospitaliers plus longs et des coûts médicaux plus élevés.
La start-up Nanosynex, basée en Israël et accompagnée par Quest for health, souhaite adresser ce problème majeur grâce à ses tests rapides qui permettront de prescrire le bon antibiotique au bon patient. Diane Abensur, CEO et co-fondatrice, nous parle de son projet et nous livre de précieux conseils sur l’entrepreneuriat.

Pouvez-vous nous parler de Nanosynex et de sa genèse ?
L’idée de Nanosynex est née du Pr. Levenberg, doyenne de la faculté d’ingénierie biomédicale du Technion Institute of Technology – Institut leader en biotechnologie en Israël – qui a imaginé une plateforme microfluidique visant à dépister des phénomènes de résistance aux antibiotiques, qui permettrait de mieux diagnostiquer et prévenir certains phénomènes de résistance qui empêcheraient un traitement efficace.

Avec mon associée Michelle Heymann, rencontrée dans le cadre d’un MBA, nous cherchions à nous investir dans un projet médical qui avait du sens. Nous avons rencontré la doyenne de la faculté d’ingénierie biomédicale qui nous a présenté son idée. Très vite, nous avons été portées par ce projet et avons souhaité transformer la POC (proof of concept) en un produit mature prêt à être mis sur le marché. Nous nous sommes associées à trois pour créer la société en 2017. Nous avons toutes les trois des profils différents mais complémentaires : Pr. Levenberg apporte la compétence scientifique, Michelle apporte la compétence marketing et j’apporte pour ma part la compétence business.

Aujourd’hui, nous développons un test de diagnostic personnalisé qui permet de vérifier en un temps record la résistance bactériologique aux antibiotiques.
Le but ? Prescrire plus rapidement le traitement le plus adapté au patient souffrant d’une infection bactérienne.

 

Pouvez-vous nous donner un exemple concret de la manière dont l’innovation aura un impact sur les patients ?
Prenons l’exemple de l’infection urinaire, qui touche 1 femme sur 2 au cours de sa vie. Dans la plupart des cas, elles sont traitées par un antibiotique à spectre large, qui peut se montrer inefficace sur une patiente donnée. Cela peut entraîner le développement d’une résistance aux antibiotiques, qui peut évoluer en pyélonéphrite (infection du rein) et nécessiter une hospitalisation. À l’hôpital, la patiente recevra un antibiotique plus adapté, mais il faudra attendre entre 48 et 72 heures pour que les tests soient effectués, ce qui est encore trop long.

Nanosynex propose un test qui permet de déterminer le traitement antibiotique le plus adapté à un patient en moins de 5 heures. Pour ce faire, le test analyse la croissance des bactéries en contact avec différents antibiotiques à partir d’échantillons du patient (urine, salive, sang). Notre test peut être utilisé pour traiter toute infection bactérienne.

 

Nanosynex est basée en Israël. Pourquoi venir s’implanter dans le Grand Est et se faire accompagner par Quest for health ?
L’industrialisation, la mise aux normes réglementaires, l’approbation par les organismes réglementaires et la production sont réalisées en Europe. La France étant le pays leader en microbiologie, notre choix s’est vite porté sur ce pays et plus spécifiquement sur le Grand Est car nous bénéficions de l’appui de Biosynex, entreprise familiale basée à Illkirch (67), qui nous soutient au niveau logistique et qui pourra s’occuper de la distribution de nos produits.

Par ailleurs, nous avons besoin d’être accompagnés sur des questions stratégiques, notamment les levées de fonds, la recherche de bons partenaires dans la production et la réalisation d’études cliniques et enfin, l’internationalisation. L’expertise de Guillaume Vetter-Genoud, directeur de Quest for health, nous est précieuse car il a eu lui-même cette expérience entrepreneuriale qui lui permet de nous aiguiller au mieux et qui nous a permis des mises en relation de qualité avec des directeurs de département de microbiologie. Cette expertise ne se retrouve pas partout en France.

Diane Abensur en entretien d'accompagnement stratégique avec Guillaume Vetter-Genoud

De quelle réalisation êtes-vous la plus fière ?
Ce dont je suis plus fière, c’est d’avoir réussi à créer une équipe multidisciplinaire de 15 personnes. La réussite de tout projet dépend en premier lieu de son équipe. Bien choisir son équipe, trouver des profils complémentaires, faire grandir l’équipe en interne est un enjeu primordial.

Les profils que nous recherchions étaient très spécifiques car ils croisaient trois disciplines. Nous avons aujourd’hui une équipe internationale composée de huit nationalités avec la parité parfaite. Chaque collaborateur apporte son expertise binationale et technique, c’est très enrichissant pour l’ensemble de l’équipe.

 

Des tips sur le recrutement ?
Les recommandations en interne font la clé d’une équipe soudée. La meilleure dynamique c’est de recruter les anciens collaborateurs de ses collaborateurs ou recommandés par des contacts professionnels. Cette stratégie nous a permis de créer une très belle synergie au sein de l’équipe. Il ne faut pas sous-estimer la force du recrutement de l’intérieur et inciter les employés à poster les offres sur leurs pages Linkedin. Cela aura plus d’impact que des chasseurs de tête.

 

Quels sont les principaux défis de Nanosynex ?

Le premier défi de Nanosynex a été d’effectuer un transfert de technologie efficace et optimal pour la société. Ce n’était pas une mince affaire de prendre un pool de brevets et d’en obtenir les droits commerciaux. Nous avons été aidés dans cette étape par des mentors – des chercheurs de l’Université principalement – ayant été dans ce processus.

Le deuxième défi a été le financement : comment trouver des financements pour une start-up sans prototype ? La levée de fonds en SEED ou en série A est très compliquée dans le milieu médical. Il faut essayer de trouver des business angels et des investisseurs qui s’intéressent au sujet et qui y croient car il est difficile au démarrage de présenter toutes les garanties.
Dans le secteur de la santé, le financement est central dans la poursuite de son projet du fait du besoin en équipement plus important, de la durée du développement qui est plus longue ainsi que des aspects réglementaires à prendre en compte.

Enfin, le dernier défi : Comment construire la bonne équipe avec les bons profils pour combler chaque aspect de notre technologie ? Nous avons su nous entourer de personnes assez ouvertes d’esprit pour croiser tous ces aspects. On appelle ça dans notre secteur la bioconvergence.

 

Quelles sont les prochaines étapes de Nanosynex ?
La prochaine étape est la mise sur le marché de la première génération de notre test qui va permettre un dépistage rapide et précis en laboratoire.
Nous travaillons déjà sur la deuxième génération de notre produit, et nous souhaitons tester prochainement les échantillons directement au pied du patient.

 

Un conseil pour les entrepreneurs qui se lancent ?
Entourez-vous de mentors et de conseillers dans tous les domaines : scientifique, juridique, financier et communication/marketing. N’hésitez pas à poser des questions, même si elles vous paraissent stupides. Il ne faut pas avoir honte de poser des questions, car l’entrepreneur n’est pas censé maîtriser tous les domaines, mais il doit être capable de parler à des avocats, des investisseurs et des scientifiques. Et il doit savoir toquer à toutes les portes.

Découvrez aussi